Crue de 1928

1928 : les deux rives inondées en aval de Grenoble

Dans les archives du Petit Dauphinois, les mots suffisent pour mesurer l’impact qu’ont eu les crues de l’Isère et du Ruisset, en 1928, sur la population de Veurey et de Noyarey.

Dans le Petit Dauphinois, le quotidien local de l’époque, les articles relatifs aux inondations sont réguliers. D’ailleurs, en ce 23 octobre 1928, le journal fait encore référence à la crue de la Romanche le 28 septembre à Bourg d’Oisans, affirmant : « La situation s’améliore mais les dégâts sont énormes », précisant par ailleurs que 200 ha sont perdus pour les agriculteurs locaux. Plus loin, il est aussi mentionné que, la veille, la Lignarre a rompu un barrage et s’est étalée dans la plaine des Sables… Mais les regards du jour se portent davantage vers l’aval de Grenoble où, comme il est titré : « L’Isère rompt ses digues et submerge de nombreux villages sur les deux rives ». Au Fontanil, les habitants évacuent leurs maisons ; à Moirans, 300 habitants sont en péril ; dans la plaine de Voreppe, un témoin affirme : « Les eaux sont plus hautes qu’elles ne l’ont été lors des inondations de 1914 ». Comme le souligne le reporter du Petit Dauphinois : « Elles le seraient bien plus si elles n’avaient pas envahi la plaine de Veurey sur l’autre rive ».

De fait, en ce 23 octobre, on n’a pas beaucoup de nouvelles sur la crue survenue la veille en rive gauche. Les gendarmes de Sassenage se sont rendus sur place à Noyarey pour constater que, l’eau arrivant au premier étage, toutes les fermes de la plaine sont dans un état critique, et que la meilleure façon de circuler c’est désormais en barque ! Le lendemain, on peut lire que la situation semble s’améliorer mais la manque d’informations est cruel : « Le pont de Veurey menace de s’effondrer. En aval du pont, il y a peu d’eau dans le lit ordinaire de l’Isère, le torrent déferlant dans la plaine », mais, dans la colonne voisine : « Le pont de Veurey a-t-il été emporté ? » Ce qui est sûr c’est que le tramway ne fonctionne plus entre les stations de Noyarey et de Veurey. Ce n’est que dans l’édition du 27 octobre que l’on en saura davantage que des ouï-dire et des échos lointains. Un certain Raffé, reporter au Petit Dauphinois, y relate son « expédition pédestre » sur les lieux du désastre. Florilège d’extraits dans un style très particulier, mais sans appareil photo ni caméra, le verbe avait alors force de réalité et de vérité.

Extraits du Petit Dauphinois du 27 octobre 1928

Pour aller à Veurey, il faut donc passer contre le flanc de la montagne, par un sentier qui date de mardi seulement. Mais quel sentier ! Il monte à pic, puis redescend au niveau de l’eau…

Enfin après une heure d’acrobatie une heure passée à la conquête d’un équilibre qui vous fuit sans cesse, vous arrivez au village. A Veurey, les belvédères sont nombreux qui permettent de contempler le triste spectacle de la plaine inondée.

Toute la partie basse de Veurey est dans l’eau. Entre le pont et les premières maisons, les eaux courent à une vitesse terrifiante. Quant au pont, il parait avoir été désossé du côté de Voreppe où la maçonnerie seule a subsisté, supportant la pile qui penche d’une façon inquiétante… »

Cette brèche est commencée. Pour atteindre la digue, il fallut d’abord amener un bateau, ce que les sapeurs firent hier à dos d’homme, après ce travail au clair de lune. Dès ce matin, sur des eaux où la navigation est délicate, on se mit à l’œuvre. Les explosifs sont difficiles à placer : une forte charge fut même emportée par le courant. On fait sauter les arbres, on pioche. Et par cette ouverture, les eaux se précipitent en bouillonnant avec un bruit qui emplit seul l’immense silence.

Dimanche dernier, après l’ordre d’alerte, les habitants menacés avaient évacué les bestiaux et attendaient. Vers minuit, l’Isère parut baisser. Bien des gens se couchèrent alors, croyant le danger passé. Mais, vers une heure, une brèche se fit dans la rive gauche en amont, et ce fit la folle ruée des eaux sur Veurey. Ceux qui s’étaient couché n’eurent que le temps de fuir.

 

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